SANTé ET POLITIQUE, CRISE SANITAIRE, AFFAIRE RAOULT, FAKE-NEWS : AGNèS BUZYN LIVRE SES VéRITéS

"Je pense que l’engagement est plus que jamais nécessaire dans le monde dans lequel nous vivons, je ne sais pas où je serai utile un jour, mais je n’ai pas dit que je ne m’engagerai plus !". Aujourd’hui conseillère à la Cour des Comptes après un passage à l’Organisation Mondiale de la Santé, Agnès Buzyn, ministre de la Santé et des Solidarités de 2017 à 2020 a quitté la politique après sa candidature à la mairie de Paris. Un virage, à l’époque lié à son regard critique sur la gestion de la crise sanitaire du Covid-19, dont elle laisse donc entendre qu’il n’a rien de définitif.

Cette crise sanitaire, entre affirmations scientifique parfois péremptoires et multiplication des fake-news ou supposées telles, a particulièrement mis en lumière le sujet de la vérité en médecine et notamment le rôle des responsables politiques en la matière. "La pédagogie autour des décisions a peut-être été insuffisante mais je ne pense pas que les pouvoirs publics ont menti", affirme la ministre, interrogée par le Dr Jean-François Lemoine et le Dr Jean-Paul Ortiz sur la méfiance vis-à-vis de la parole politique qui s’est installée lors de la pandémie.

Les doutes sur le mode de contamination par le virus du Covid-19

C’est avec sa casquette scientifique de médecin qu’Agnès Buzyn analyse les faits qui ont abouti à ces interrogations sur la sincérité de cette parole politique. "Un des points sur lequel repose le sujet de la vérité en médecine, c’est le temps de la consolidation scientifique : durant le temps de la recherche, tout peut être remis en cause, mais lorsqu’un fait scientifique est finalement avéré, il ne peut plus y avoir de débat". Illustration de ce propos : les atermoiements sur la nature du mode de la contamination par le virus SARS-Cov2. "Pendant des semaines, les scientifiques du monde entier ont expliqué que le Covid se transmettait par des gouttelettes, que l’on pouvait s’infecter par les mains, ce qui a abouti à ce que l’on pense qu’il était indispensable que l’on nettoie tout avec du gel hydroalcoolique. Puis est arrivé dans le débat scientifique le fait que la contamination se faisait par effet aérosol et qu’il fallait donc porter des masques. Ce fait scientifique a été validé vers les mois de mai et juin 2020. Mais cela ne veut pas dire que l’on a menti en mars ou avril 2020 lorsque l’on a dit que c’était les gouttelettes, c’est trop facile de refaire le match une fois que l’on a la certitude que ce que l’on a dit au départ est faux !".

L’affaire des masques

Le vecteur de contamination par le virus du Covid-19 est à l’origine d’une des plus grandes polémiques liées à la crise sanitaire, l’affaire des masques, d’abord présentés comme inutiles, puis ensuite indispensables… mais indisponibles ! "On nous a menti sur la fourniture des masques !", a rappelé le Dr Jean-Paul Ortiz. Réponse sous forme d’esquive d’Agnès Buzyn : "Je n’étais plus aux affaires, c’est difficile pour moi de juger de la sincérité de ce qui a été dit à de moment-là !".

Mais elle apporte toutefois sur ce sujet quelques précisions : "La France est le pays au monde qui avait le plus de masques et le premier pays occidental à en avoir commandé de nouveaux dès janvier 2020. Mais on ne savait pas que la matière première de ces masques -celle qui compose le fameux tissu bleu, NDLR- était entièrement fabriquée en Chine, à Wuhan, dont la province a été coupée du monde durant dix semaines à partir du 24 janvier 2020. Aucun décideur politique n’avait anticipé ou même imaginé cette centralisation à outrance ! Mais je ne comprends pas pourquoi cela n’a pas été dit aux Français !".

La pénurie de masques… et de médicaments

Une explication qui amène Agnès Buzyn a aborder le sujet de la pénurie de médicaments qui est apparu au grand jour lors de la crise sanitaire mais qui sévit encore aujourd’hui en France. "J’ai mis en place dès 2018 un plan pour lutter contre ces pénuries. A ce moment-là, en effet, j’ai réalisé que la production des principes actifs, et c’est le résultat de la mondialisation depuis 30 ans, était centralisée en Chine et en Inde… mais pas pour les raisons que l’on croit : ce n’est pas en raison du plus faible coût de la main d’œuvre dans des pays mais parce que cette production se fait à partir d’une industrie chimique très polluante et que les normes environnementales européennes ont abouti à ce que les productions polluantes ont été décentralisées", explique Agnès Buzyn. L’occasion pour elle de souligner, à la veille d’élections européennes, que "l’Europe est un enjeu majeur de souveraineté sur les médicaments ; imaginer sur ce sujet une souveraineté à l’échelon de la France, étant donné la complexité, les coûts de fabrication et la taille mondialisées des big-pharma que nous avons en face de nous, sans la masse critique des 450 millions d’habitants de l’Europe, nous ne pouvons pas être crédibles !".

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