GUERRE EN UKRAINE : COMMENT LES ATTAQUES SE MULTIPLIENT SUR LE TERRITOIRE RUSSE, JUSQU'à MOSCOU

Nouvelle attaque de drones sur Moscou. Un mois après la première qui avait visé le Kremlin, dont les contours restent encore une énigme, et une semaine après l'incursion spectaculaire de groupes paramilitaires russes d'Ukraine dans la région de Belgorod, la capitale russe a été à nouveau visée mardi 30 mai à l'aube. Quatre à dix drones auraient été détruits dans la périphérie de la ville, selon plusieurs comptes Telegram qui ont publié des vidéos à l'appui. L'attaque a causé «des dégâts mineurs à plusieurs bâtiments» sans faire de victimes, a indiqué le maire de Moscou, Sergueï Sobianine.

Alors que le lancement de la contre-offensive ukrainienne est attendu d'une semaine à l'autre, les sabotages et attaques sur le territoire russe se multiplient ces derniers mois. Plutôt rares à Moscou et dans sa région, que plus de 500 kilomètres séparent de l'Ukraine, les frappes sont nombreuses dans les zones frontalières. Même si, la plupart du temps, Kiev rejette toute responsabilité. Le Figaro fait le point.

Attaques de drones et opérations de «sabotages» à la frontière

Dès les premiers mois de la guerre, des campagnes de sabotage ont été signalées à l'intérieur du territoire russe. En mai 2022, un institut de recherche militaire à Tver, au nord-ouest de Moscou, était incendié. À 1100 kilomètres à l'est, un feu était déclenché le même mois dans une usine de munitions à Perm, de même que deux dépôts de carburants à Briansk, près de la Biélorussie.

Initialement ponctuelles, les attaques de drones, attentats et opérations de «sabotage» se sont particulièrement multipliées ces dernières semaines dans les régions frontalières avec l'Ukraine. En mars, l'incursion d'une vingtaine d'hommes armés dans la région de Briansk a causé un choc côté russe révélant la fragilité des frontières. Selon les autorités russes, deux civils avaient alors été tués et un enfant de 11 ans blessé par ces «saboteurs» ayant ouvert le feu sur une voiture dans un village. Kiev avait démenti toute implication.

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Dans l'oblast de Belgorod, également limitrophe avec l'Ukraine, les incidents se multiplient. Depuis février, ses dépôts de carburant ont été plusieurs fois la cible de l'artillerie ukrainienne. Le 22 mai encore, les autorités russes annonçaient qu'un groupe de «sabotage» ukrainien s'était introduit dans la région. L'attaque, stoppée par l'envoi des gardes-frontières, de la Rosgvardia (garde nationale) et du FSB (services de sécurité), a fait plusieurs blessés.

D'autres attaques de drones ont été signalées sur diverses infrastructures comme des oléoducs ou stations de pompage de pétrole. Celles-ci sont de plus en plus engagées dans le territoire russe. Le 27 mai, deux drones ont frappé deux installations d'oléoducs dans la région de Tver, au nord-ouest de Moscou ainsi qu'à Pskov dans l'ouest du pays, selon les médias locaux et le gouverneur local. Déjà le 5 décembre 2022, des drones avaient détruit plusieurs appareils russes sur la base aérienne Engels 2, située dans l'oblast de Saratov, à plus de 900 km de la frontière ukrainienne.

Incursions armées à Belgorod

Lundi 22 mai, des combattants venus d'Ukraine ont mené la plus grande offensive armée sur le territoire russe depuis le début de la guerre. Deux groupes armés, la légion Svoboda Rossii («Liberté de la Russie») et le Corps des volontaires russes (RDK), ont lancé une attaque dans l'oblast de Belgorod. Immédiatement repoussée, l'incursion a néanmoins poussé Moscou à décréter un régime «antiterroriste» dans la région, une première depuis le début de l'offensive en Ukraine.

Le bilan de l'opération reste difficile à établir. La Russie a affirmé avoir tué plus de 70 «nationalistes ukrainiens» et détruit quatre véhicules blindés ainsi que cinq pick-up. «Ceux qui restaient ont été repoussés vers le territoire ukrainien, où nous avons continué à les cibler jusqu'à leur élimination complète», a déclaré le ministère russe de la Défense. Les assaillants affirment pour leur part n'avoir eu à déplorer que quelques blessés.

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Cette incursion venait à la suite de plusieurs autres, moins spectaculaires, déjà menées par des unités venues d'Ukraine dans les régions de Belgorod et de Briansk. En décembre 2022, quatre soldats du bataillon ukrainien Bratstvo avaient trouvé la mort lors d'une telle infiltration. Les 2 mars et 6 avril derniers, le groupe RDK avait également pris pied durant quelques heures sur le territoire russe. La seconde fois, Denis Kapustine a précisé s'être inspiré du survol de Vienne imaginé par le poète italien Gabriele d'Annunzio, le 9 août 1918, en distribuant à la population des tracts sur lesquels il avait fait écrire : «Habitants de Briansk, nous aurions pu vous envoyer des bombes».

Attaques sur le Kremlin

L'attaque la plus symbolique au sein du territoire russe demeure toutefois celle qui a touché Moscou dans la nuit du mardi 2 au mercredi 3 mai. Des vidéos non vérifiées, circulant sur les réseaux sociaux, ont montré le dôme du Kremlin, surmonté d'un drapeau russe, s'enflammer le temps d'une courte explosion.

Les Russes, qui ont affirmé avoir intercepté deux drones, accusent Kiev d'avoir voulu assassiner Vladimir Poutine. Le président Volodymyr Zelensky, lui, a démenti toute responsabilité dans cet événement survenu à quelques jours seulement du grand défilé militaire russe annuel du 9 mai. Un mois après les faits, le mystère plane toujours sur son déroulé exact et sur l'objectif cherché. Acte symbolique de la part de Kiev ? Stratégie du «false flag» du côté de Moscou, afin de passer pour victime et mobiliser davantage la population russe autour de la guerre ? La ministre française des Affaires étrangères Catherine Colonna a elle-même évoqué «un épisode étrange» et «mystérieux».

La nouvelle attaque ce 30 mai accroît encore la pression sur le pouvoir russe. Le gouverneur de la région de Moscou, Andreï Vorobiov, a appelé les Moscovites à «garder leur sang-froid» alors que certains districts de la région «pouvaient entendre le bruit des explosions» de la défense antiaérienne. Le bruit de la guerre retentit désormais au sein de la capitale.

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