La mobilisation ne fléchit pas ce week-end, alors que le gouvernement a choisi de dégainer le 49.3 pour faire passer la réforme des retraites, faute d’avoir l’assurance d’une majorité absolue. Des perturbations sont toujours à prévoir pour ce week-end. Transports perturbés, raffineries bloquées, barrages sur les routes… le point sur les perturbations prévues pour ce week-end, alors que les syndicats prévoient des « rassemblements locaux de proximité » ces samedi et dimanche, pour poursuivre la contestation. Les transports toujours perturbés Des perturbations restent à prévoir sur les lignes nationales et régionales ce lundi. Sur les grandes lignes nationales, la SNCF indique que 2 TER sur 3, plus de 4 TGV Inoui et Ouigo sur 5, et 3 Intercités de jour sur 5 seront en circulation. En revanche, aucun Intercités de nuit ne quittera sa gare. Du côté des transports en Ile-de-France, le trafic sera normal sur les lignes de métro, de tramway, le RER A, la ligne H, la ligne K et la majorité des lignes de bus. Il sera en revanche perturbé sur d’autres lignes franciliennes, avec 1 train sur 2 sur la ligne B, 2 trains sur 3 sur les lignes C, J, L et N, 1 train sur 3 sur la ligne U, 2 trains sur 5 sur les lignes D et R, et 3 trains sur 4 sur les lignes E et P. Des raffineries toujours bloquées Environ 37 % des effectifs opérationnels des raffineries et dépôts de TotalEnergies en France sont en grève ce samedi matin, a indiqué à Reuters un porte-parole du groupe pétrolier. Objectif : assécher les stations-service. À Gonfreville-l’Orcher (Seine-Maritime), les grévistes ont commencé la mise à l’arrêt des installations depuis vendredi soir, annonce la CGT. VIDEO. « La mobilisation la plus visible » : à Paris, les manifestants à fond derrière les éboueurs Près de Marseille (Bouches-du-Rhône), la raffinerie de Petroineos où le travail avait repris jeudi, est menacée d’arrêt total « au plus tard lundi après-midi », selon Sébastien Varagnol, délégué CGT. « Ce week-end, on prépare l’arrêt total des installations, qui aura lieu au plus tard lundi après-midi ». Jusqu’à présent, les grévistes s’étaient contentés de bloquer les expéditions de carburant, mais les raffineries continuaient à produire. Les raffineries de Donges (Loire-Atlantique), La Mède (Bouches-du-Rhône) et Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône) sont toujours en grève. Électriciens et gaziers toujours en grève Réunis vendredi, les syndicats CGT de l’énergie ont décidé de « renforcer partout » le mouvement la semaine prochaine et d’appeler à « la reconduction de la grève et à la perturbation maximum du travail », selon Fabrice Coudour, secrétaire fédéral de la CGT Énergie. Baisses de production, coupures ciblées et actions de gratuité seront toujours au rendez-vous. Le mouvement s’est par ailleurs un peu durci côté gaz, dans les onze sites de stockage souterrains de gaz de Storengy, dont le plus important à Chémery (Loir-et-Cher) a été mis à l’arrêt pour les grévistes, sans conséquences pour les clients, selon la direction. Les trois terminaux méthaniers d’Elengy, autre filiale d’Engie, sont toujours en grève, contrairement à celui de Dunkerque, opéré par le belge Fluxys, selon la direction. Côté électricité, les baisses de production se sont poursuivies vendredi (6,260 MW à 16h00 selon EDF), sans impact sur les clients mais affectant les finances d’EDF. Les ordures s’entassent toujours à Paris À Paris, 10 000 tonnes de poubelles s’entassent toujours sur les trottoirs, selon la mairie. Un ordre de réquisitions des éboueurs a bien été signé par la préfecture de police de Paris pour permettre le ramassage, mais « aucune benne n’est sortie », selon la mairie, dans les arrondissements où la collecte est normalement assurée par des agents municipaux. Selon la CGT, 95 % des salariés du site de traitement d’Ivry et 100 % des chauffeurs des deux garages étaient en grève vendredi. Concernant les éboueurs, aucun chiffre de grévistes n’a été communiqué de source syndicale. Ce samedi, la Préfecture de police de Paris a assuré que la collecte des ordures avait repris dans la capitale, après un arrêté de réquisition pris pour assurer un service minimum de ramassage des déchets. Cinq garages de camions ont repris une activité, nous affirme la préfecture. « Deux sociétés concessionnaires de traitement ainsi que plusieurs agents (ont) été requis depuis » vendredi. Certains agents de la ville de Paris réquisitionnés rencontrés par nos reporters à proximité du site d’Ivry expliquent toutefois travailler au ralenti. En parallèle, les grévistes des trois sites d’incinération de déchets produits par Paris mettent en place des « barrages filtrants » pour laisser passer des camions de collecte des ordures. Un filtrage des camions se tiendra à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine) samedi et dimanche, puis à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis) lundi et mardi, selon Fatiha Lahrech, déléguée syndicale CGT du site d’Issy-les-Moulineaux. Laisser passer des camions est une « décision de sécurité pour limiter les risques d’épidémie », explique-t-elle. Concorde et Champs interdits, manifestation sauvage dans le XIIe arrondissement La place de la Concorde a été placée sous très haute surveillance de centaines de policiers et des canons à eau prépositionnés. Les forces de l’ordre ont procédé à de nombreuses fouilles de passants et demandé aux personnes stationnant de circuler, selon des journalistes de l’AFP. A 19h00, la place s’est vidée des centaines de personnes présentes une heure auparavant qui déambulaient sans pancarte ni banderole, rendant impossible de dire s’il s’agissait de passants ou de manifestants potentiels. La préfecture avait annoncé plus tôt que tout rassemblement était interdit à cet endroit, situé à quelques centaines de mètres de l’Assemblée nationale et de l’Élysée, lieu de ralliement aux opposants à la réforme jeudi et vendredi soir. Vendredi, des heurts violents s’étaient produits, avec 61 interpellations au final. Toujours à Paris, la CGT Île-de-France a organisé un rassemblement place d’Italie (sud de Paris), qui s’est mué en cortège et remontait vers le nord de la capitale. Des heurts commençaient à se produire en début de soirée : feux de poubelles, abribus saccagés etc. Plusieurs manifestations ce samedi Quelques centaines de manifestants ont défilé à Marseille. Dont Romain Morizot, 33 ans, ingénieur télécom dans l’aviation, qui témoigne : « Que nous reste-t-il à part continuer à manifester ? On n’a que la mobilisation, qui était pacifique jusqu’au 49.3. Mais maintenant, ça va potentiellement mettre de la tension sociale partout. On va continuer, on n’a pas le choix ». Les rassemblements se sont déroulés dans plusieurs lieux en régions, des grosses villes aux bourgs moyens : Lille, Amiens, Caen, Saint-Étienne, Roanne, Besançon, Dijon, Grenoble, Gap, Annecy, Lodève etc. Certains cortèges ont compté plusieurs milliers de personnes, comme à Nantes (6 000 selon la police, 15 000 selon les syndicats) ou Brest (entre 5 et 8 000), avec quelques tensions. À Bordeaux, un cortège improvisé a réuni 1 900 personnes selon la préfecture, et des face-à-face avec les forces de l’ordre ont eu lieu rue Sainte-Catherine, plus longue rue piétonne d’Europe et très fréquentée en ce samedi après-midi. Jeudi, peu après le recours par Élisabeth Borne à l’article 49.3 de la Constitution, qui permet l’adoption d’un texte sans vote, sauf motion de censure, l’intersyndicale avait appelé à des rassemblements ce week-end. Et à une 9e journée de grèves et manifestations le 23 mars. « Le président de la République suit évidemment l’évolution de la situation » sur le terrain, a indiqué l’entourage d’Emmanuel Macron à l’AFP.