LES SANS-ABRI NE SONT PAS DES BALUCHONS QU’ON BALLOTTE D’UN BOUT à L’AUTRE DE LA FRANCE

LOGEMENT - En juillet 2017, le Président de la République prenait un engagement fort : plus personne ne dormirait à rue.

Six ans plus tard, le constat est sans appel : chaque soir, des dizaines de milliers d’enfants, de femmes et d’hommes se retrouvent dehors, dans leur voiture ou dans le lit de camp d’un gymnase réquisitionné. À cela s’ajoutent des structures d’hébergement et des hôtels sociaux saturés de toute part.

Face à cet échec patent, le gouvernement voit aujourd’hui le mur s’approcher. Il vient de sortir de sa botte une idée qui pourrait sembler en apparence séduisante : la création de « SAS régionaux » pour sans-abri. Le but affiché : rééquilibrer l’effort de solidarité à travers le territoire national pour répondre à la pénurie d’hébergement en région parisienne.

L’objectif est en réalité bien autre.

« Six ans après l’engagement d’Emmanuel Macron, le constat est sans appel : chaque soir, des dizaines de milliers d’enfants, de femmes et d’hommes se retrouvent dehors, dans leur voiture ou dans le lit de camp d’un gymnase réquisitionné. »

Car ce que le gouvernement feint d’oublier, c’est que les sans-abri ne sont pas des baluchons qu’on peut ballotter d’un endroit à l’autre. Bon nombre d’entre eux travaillent et ont des enfants scolarisés. Que deviendront-ils demain, envoyés sans coup férir à l’autre bout du pays ?

Ce que le gouvernement ne dit pas non plus, c’est que pour épargner, une fois encore, des territoires franciliens fort aisés, tels que Neuilly qui disposent pourtant d’espaces mobilisables, il préfère mettre à contribution des communes bien plus modestes de province.

Ce que le gouvernement ne dit pas, enfin, c’est que ces centres pour sans-abri d’un genre nouveau, plus qu’à de l’hébergement d’urgence, ressemblent davantage à des lieux de privation des libertés, gardiennés et clôturés, est-il précisé.

À défaut d’avoir logé les sans-abri, le Président de la République propose donc de les promener.

L’absence de logements et de places d’hébergement est un problème connu, indépendamment des Jeux Olympiques, que nous dénonçons depuis de trop nombreuses années maintenant.

Les retombées économiques prévues avec les JO, les recettes engendrées par le secteur du tourisme, sont pourtant des leviers pour investir dans la création de places d’hébergement et de logements sociaux, et être digne des valeurs incarnées par les jeux. Au lieu de cela, en éloignant des personnes de leurs lieux de vie, l’État va reporter la misère vers des collectivités qui n’auront pas davantage de moyens d’accueil ni d’insertion pour y faire face.

« Même quand on est sans abri, on a des habitudes de vie, des réseaux de solidarité auxquels on s’accroche. Partir ailleurs, cela ne s’improvise pas. »

Pour mieux équilibrer l’effort en matière d’hébergement, il conviendrait de réunir au moins trois conditions.

D’abord, commencer par l’Île-de-France où les déséquilibres sont patents et ne cessent de s’accentuer. Les places sont massivement concentrées à Paris et en Seine-Saint-Denis, et quasiment absentes dans la banlieue ouest. Paris compte 4 places d’hébergement pour 1000 habitants contre 1 dans les Hauts-de-Seine. Rien ne justifie un tel décalage.

Ensuite, mettre en place un véritable accompagnement social pour les personnes concernées. Même quand on est sans abri, on a des habitudes de vie, des réseaux de solidarité auxquels on s’accroche. Partir ailleurs, cela ne s’improvise pas. Un tel projet suppose un travail de dentelle, un effort de conviction qui prend du temps.

Enfin, un tel objectif nécessite une association étroite des élus locaux. L’hébergement d’urgence relève certes des compétences de l’État. Mais l’installation d’un centre d’hébergement, pour qu’elle soit réussie, nécessite que les élus locaux soient impliqués dans les choix qui sont faits.

Autant de conditions qui, aujourd’hui, ne sont pas remplies. Autant de conditions qui permettraient de mettre fin au scandale qui fait que la 6e puissance économique du monde compte encore des milliers de personnes à la rue.

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